Les limiteurs : caractéristiques et usages

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Le limiteur est un outil de traitement dynamique qui s'apparente beaucoup à la compression. Bien connu des ingénieurs en mastering, il leur est utile pour optimiser le volume général d'une chanson. Mais cet outil peut également rendre de fiers services au mixage en accomplissant certaines tâches que son cousin le compresseur ne peut réaliser avec autant de facilité. 

Un limiteur est un module de traitement qui permet d'appliquer rapidement un très fort taux de compression. En théorie, tout compresseur permettant d'atteindre un ratio élevé de compression (disons plus de 20:1) peut être considéré comme un limiteur. D'ailleurs, plusieurs compresseurs (LA-2A, Neve 33609, DBX 160, etc.) offrent un sélecteur leur permettant d'agir en tant que limiteur. 

Cependant, ces compresseurs ne permettent généralement pas de connaître exactement le volume de sortie maximal. C'est là qu'interviennent les limiteurs de type « brickwall ». Les brickwall limiters permettent de fixer un volume qui ne sera jamais dépassé. Avec leur attaque instantanée, ils dressent en quelque sorte un mur de brique que l'audio ne pourra jamais franchir. Cette importante caractéristique permet bien sûr d'éviter l'écrêtage au mastering, mais rend aussi le limiteur extrêmement efficace dans le traitement des pistes présentant des pointes à la fois fortes et courtes.

Les réglages

Le limiteur compte généralement moins de réglages que son cousin le compresseur. Il y a d'abord le seuil (threshold) qui détermine le point à partir duquel le signal sera limité. Ce seuil peut être déterminé par un réglage fixant le threshold ou atteint en augmentant le volume d'entrée (input level). Un autre paramètre, appelé « ceeling » ou « output level », permet de fixer le volume maximal de sortie. En audio numérique, ce plafond s'exprime en dB négatif. Ainsi un plafond de -0.2 dB indique que le volume maximal sera de 0.2 dB inférieur au zéro numérique. Il comporte très souvent un release qui, comme pour le compresseur, détermine la vitesse à laquelle le limiteur cessera son action. Bien sûr, un ou des vumètres sont ajoutés pour apprécier le volume d'entrée, de sortie et l’ampleur de la réduction.

Étant donné qu'ils sont souvent placés à la toute fin de la sortie générale (master bus, main bus ou mix bus), les plug-ins de limiteur comportent souvent des sélecteurs de « dithering » offrant la possibilité de réduire la profondeur d'échantillonnage (24, 20, 16, 12 et parfois 8 bits) pour correspondre au support final. Pour un CD par exemple, on utilise le 16 bits.

Un des limiteurs de Waves.

Un des limiteurs de Waves.

En pratique

À LA FIN DU MIX BUS

L'application la plus connue du limiter est certainement la maximisation du volume de sortie générale d'un mixe. Il faut bien sûr s'assurer que le limiteur est l'élément final du canal de sortie, étant donné que l'insertion d'un quelconque traitement après celui-ci annule de facto sa principale fonction : fixer le volume maximal. Au mixage, l'utilisation d'un limiteur sur le bus de sortie se voudra toujours temporaire. Il est en effet nettement plus sage de laisser l'optimisation finale du volume à l’étape du mastering. Ce qui n'empêche pas le limiteur d'être utile pour diverses tâches d'évaluation.

Évaluer la réaction du mixe  Il peut être utile d'insérer temporairement un limiteur à la fin de sa chaîne pour obtenir un aperçu de la manière dont le mixe réagira une fois son volume maximisé. Vous serez à même de repérer des problèmes qui seraient autrement passés inaperçus (le volume excessif d'un effet ou la présence de bruits de fond, par exemple) et de déceler les pointes qui font réagir le limiteur de manière excessive.

Faciliter la comparaison avec du matériel de référence  Un mixe en cours de production et une pièce masterisée sont très différents, particulièrement en ce qui a trait au volume. L'insertion d'un limiteur à la sortie de votre mixe réduira les écarts de volume, vous permettant ainsi de mieux évaluer comment votre mixe tient la route lorsque confronté à une pièce commerciale.

Maximiser le volume du mixe lors de la présentation au client  Il est de pratique courante d'utiliser une version « limitée » lors de la présentation d'un mixe au client. Cette méthode vise le même objectif que l'application précédente : rapprocher le mixe de ce que l'on a l'habitude d'entendre commercialement. Certains clients demandent parfois une version CD ou MP3 qu'ils pourront écouter ailleurs qu'en studio. Il est donc approprié d'utiliser un limiteur pour rendre cette version du mixe plus près d'un volume commercial usuel. Pour ces types d'applications, il est sage de ne pas excéder plus de 3 dB ou 4 dB de réduction afin de ne pas trop modifier outre mesure le rendu du mixe.

SUR LES PISTES

Maîtriser la dynamique de la basse  Il arrive parfois que la dynamique de la basse semble hors de contrôle malgré l'ajout de compression. Dans ces cas particuliers, un limiteur peut souvent adoucir ces écarts de dynamique tout en évitant les effets secondaires liés à la surcompression. De même, certaines pièces requièrent une basse présentant très peu de variation dynamique. Un limiteur permettra d'atteindre cet objectif en assoyant la chanson sur une basse soutenue et stable.

Contrôler les transiants  Parfois, une caisse claire, une basse de style funk, une guitare acoustique ou une percussion a tellement d'attaque qu'il devient difficile de les intégrer dans le mixe. Il est souvent possible de circonscrire ces fortes pointes avec un limiteur. Dans le cas où l'instrument présente à la fois de fortes pointes et des écarts dynamiques importants, on utilisera un compresseur et un limiteur sur la même piste afin de tirer avantage des forces de chacun de ces outils : le compresseur pour uniformiser le volume; le limiteur pour contenir les fortes pointes.

Traitement parallèle  Une piste avec un limiteur peut être utilisée en parallèle avec la piste d'origine pour d’allonger la résonance d’instruments percussifs ou contrôler les écarts de volume d’une piste tout en conservant, en tout ou en partie, la dynamique de la piste originale. Cette technique donne également de bons résultats pour les pistes de voix agressives (rock, métal, punk, etc.) et celles de style rap.

Consolider les basses fréquences du mixe  Des basses fréquences stables sont souvent nécessaires pour conférer au mixe une assise solide. On créera d'abord un sous-groupe composé du kick drum, de la basse et des autres éléments jouant un rôle important dans les basses fréquences (un synthé de basse, par exemple) pour ensuite y insérer un limiteur. Les éléments placés dans le sous-groupe travailleront ainsi comme un ensemble, consolidant ainsi les basses fréquences du mixe. Généralement, un taux de réduction de 6 dB est suffisant pour obtenir cet effet unificateur.

Limiteur et mastering

Au risque de me répéter, il n'y a aucun avantage à placer un limiteur sur votre mixe final si vous envisager de le faire masteriser. Outre le fait que vous ne laisserez aucune marge de manoeuvre à l'ingénieur en mastering, l'action d'un limiteur est impossible à annuler et peut générer des anomalies autant sur le plan de la dynamique que sur la qualité sonore en général.

Éric Noël

Musicien, propriétaire de studio, réalisateur et formateur, Éric Noël œuvre dans le domaine de la production musicale depuis plus de 30 ans. Il est également le créateur de MusiqueProd.com et l’auteur du best seller : Comprendre le mixage.

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